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Newsletter n°10

Compte rendu du rendez-vous citoyen du 25 septembre

Amoureux de leur territoire


Avec Claude Breteau président de Mémoire et Patrimoine Vivant

Intervention de Claude Breteau, président de Mémoire et Patrimoine Vivant
Nous tenions à inviter Claude Breteau parce qu’il préside Mémoire et Patrimoine Vivant, un groupe d’amoureux de leur ville et de leur territoire, qui est aussi le nôtre. Ils sont les mieux à même de contaminer, dans ce sentiment d’appartenance, les nouveaux venus que nous sommes, pour la plupart d’entre nous. 

L’histoire nous apprend que Corbeil-Essonnes est née de son rôle de porte sud de Paris, depuis des temps immémoriaux. Tout comme Pontoise, installée dans le rôle équivalent de porte ouest. Voici plus de dix siècles, afin de garantir sa sécurité le roi de France faisait de Corbeil le siège d’un important comté. Qui tient Corbeil tient Paris, disait-on alors. Et cette fonction de porte ne s’est pas limitée à la défense. De nombreuses activités économiques en ont découlé… et en découlent encore. Il suffit d’observer la prolifération actuelle de hangars de logistique sur les plateaux d’Évry, de Sénart, et même de Mennecy. Ils prolongent les importants sièges d’activités de services (chaînes d’hôtellerie ou du grand commerce), arrivées dans les précédentes décennies.
Cette singularité au niveau de l’économie s’est également traduite sur le plan humain. Au début des années 1960, un étudiant parisien débarquant ici en terre inconnue, pouvait être frappé par une ambiance sociale très distincte de la capitale. Cette ville encore un peu parisienne, mais déjà très provinciale, était peuplée des gens décontractés et gentils, pour la plupart.

Corbeil-Essonnes vivait encore dans un âge d’or, installé depuis plus d’un siècle. À la base, une économie en expansion ininterrompue, une population enracinée et prompte à inclure les nouveaux venus. Les séniors d’aujourd’hui, dont le groupe de Mémoire et Patrimoine Vivant, se souviennent avec nostalgie de cette période. Corbeil-Essonnes était sous-préfecture de Seine et Oise. Ses marchés foires et fêtes lui permettaient de rayonner sur les villages avoisinants et au-delà, sur un espace encore plus large que l’actuelle agglomération Grand Paris Sud. 

Sur le plan administratif, l’émiettement communal de la France provoquait pourtant des tensions. La fusion des communes de Corbeil et d’Essonnes, décrétée en 1951, a causé bien des ressentiments, longs à se résorber. Il est si facile, pour les hommes politiques, de flatter les orgueils de clochers pour s’imposer ! Notre pays, suivant l’exemple de ses voisins, réalise maintenant que la gestion des territoires nécessite deux métiers bien distincts : celui des services de proximité (écoles, gymnases, stades…) et celui des ensembles urbains (transports en commun, hôpitaux, universités, équilibre habitat/emploi, paix sociale…). Les métropoles françaises à la tête de l’innovation (Nantes, Lille, Lyon…) mettent dans les priorités de leur action le développement du sentiment d’appartenance à leur territoire global. Quand ce territoire est très étendu, établir une démocratie à taille humaine est compliqué. L’histoire a facilité les choses dans une métropole comme Lille-Roubaix-Tourcoing. Pour la région de Paris, il est difficile de trouver des identités territoriales distinctes au niveau de 200 000 à 300 000 habitants. C’est pourtant ce que préconisaient plusieurs concurrents lors de la consultation d’architectes pour le Grand Paris, organisée sous le septennat Sarkosy : une région urbaine multipolaire. Et c’est aussi ce qui se dessine spontanément autour de la porte nord de la région urbaine de Paris, dans le secteur Roissy-Villepinte, ou encore autour de Massy et sa porte océane. Alors pourquoi pas autour de la porte Sud ?

Avec la démarche de Grand Paris Sud, le pouvoir s’inscrit dans cette logique. Elle mettra du temps à porter tous ses fruits, mais on peut y reconnaitre une belle cohérence avec l’histoire de cette ville de Corbeil-Essonnes, montée sur les plateaux voisins de Sénart et d’Évry, car autour du vieux germe urbain, la cuvette Seine-Essonne devenait trop étroite.

Claude Breteau nous dit qu’aujourd’hui, même les élus de Corbeil-Essonnes ne sont pas sensibles à l’identité de leur ville. La masse des nouveaux-venus, qui se perçoivent dans l’indistinction d’une grande couronne parisienne, est trop lourde. Pourtant, les séniors de Mémoire et Patrimoine Vivant sont là pour lui montrer que l’histoire et la géographie la dotent d’atouts qui rendraient jalouses bien des provinces. Ils ont produit une quantité impressionnante de documents vidéo, qui maintiennent en vie l’âge d’or qu’ils ont connu ; un véritable musée.

L’association Mémoire et Patrimoine Vivant est née en 1994. Au début ils étaient deux à s’y employer activement : Claude Breteau et Christian Beaudoin. Tout de suite ils ont donné la priorité à la collecte de témoignages de la mémoire orale, car la mémoire sert à construire l’avenir. Très vite ils ont mesuré l’ampleur de leur entreprise, et n’ont pas eu de mal à porter à quinze le nombre de militants actifs, qui produisent encore un DVD par mois, présenté le premier lundi du mois au cinéma Arcel. On peut se procurer ces documents finis à l’Office de tourisme, sur la place du marché. En outre, ils nourrissent sur internet le site de mémoire et patrimoine vivant, ou l’on peut visionner un très grand nombre de leurs interviews.

La singularité sociale de cette ville industrielle prospère se lit sur les visages et dans les propos de ces témoins, que Claude nous donne à voir en projetant quelques extraits. Il nous parle d’une ville aux rues continuellement animées, car la plupart des usines pratiquaient les 3/8. De ce fait, bien des commerces restaient ouverts longtemps. Toute la population vivait au rythme des sirènes marquant le terme des factions. Non seulement elles étaient décalées, mais chacune avait un son particulier. Ainsi chacun pouvait savoir qui, de ses connaissances, quittait ou prenait son travail.

Pas de souci d’emploi. On avait une place de père en fils et en petit-fils chez Decauville, Crété, Darblay… Claude parle d’une famille qui obtint de Darblay de caser, d’un seul coup, sept membres de sa parenté, sans emploi en province. Le personnel logé dans les rangées d’immeubles collectifs en meulière, sur le versant de Villabé, disposait d’un jardin de 500 mètres carrés par logement. Le paternalisme allait bon train. De là cette ambiance provinciale, qui parfois provoquait des tensions à l’intérieur même des syndicats. Claude nous parle de la colère d’un syndicaliste venu de Paris suite aux fusions des imprimeries, contre les militant locaux qui désertaient le piquet de grève pour aller aux champignons.

La baignade dans la Seine était au premier rang des pratiques favorisant le brassage de toutes les classes sociales. Dans un extrait du DVD « Mémoire de l’eau », nous voyons le couple Menut ; les maîtres-nageurs-sauveteurs et leurs filles, qui nous parlent de la baignade dans la Seine. Tout l’été, la simplicité des tenues de bain abolissait les frontières, tout comme la pratique du sport avec des chefs de services ou des patrons encadrant ou entrainant des équipes. Le garage à vélos de la baignade, à la place des tennis actuels, s’organisait en cinq rangées. Les jours de fêtes nautiques ou de compétitions, on pouvait compter plus de 1000 spectateurs sur des tribunes occasionnelles, le long du fleuve.

Un autre extrait, tiré du DVD « L’accent d’Essônne », nous fait connaitre Christian Roblou et le parler des paysans du Gâtinais. En position dominante à la papeterie Darblay, cet important fond de population avait afflué depuis la création de la ligne Montargis-Paris. Il avait installé cet accent traînant dans l’ancienne commune d’Essonnes. Christian Roblou en a écrit un lexique, pour ne pas oublier. L’intégration des étrangers, venus de Pologne ou de Tchécoslovaquie, souvent via les mines du nord, ne posait aucun problème. Le contact était facile à établir au travail ou avec les continuels petits groupes de discussion près des pêcheurs, sur les ponts de la RN7 enjambant les divers bras de l’Essonne, ou près des grands moulins. Le lexique de Christian Roblou englobe aussi l’argot des usines, chacune ayant son propre terme pour désigner le même objet.
Claude Breteau exprime aussi le pincement des séniors de cette ville rayonnante de plus de 20 000 habitants, à voir tous ses attributs de petite capitale disparus, y compris sa sous-préfecture. Regrets aussi de n’avoir pu empêcher la collection de matériel roulant Decauville partir fonder un musée dans la Sarthe. Il reste encore un grand hangar et deux ponts transbordeurs conçus par Gustave Eiffel, mais saurait-on faire un musée avec cela ?
Prochains Rendez-Vous Citoyens

Mercredi 13 novembre 18hh00
Le marché des bureaux, avec Jean-François Grimaud
Au café « Le Palais » place Mendès-France

Mercredi 11 décembre 18h00
L’agriculture…   (à confirmer)
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