Évry-Courcouronnes commune nouvelle
Il ne s’agit pas d’une fusion, mais de la création d’une commune nouvelle. Elle est administrée par 77 conseillers municipaux, mais leur nombre se réduira à 55 après les élections municipales de 2020.
Actuellement les tendances politiques sont gommées. Cependant, la délégation des responsabilités tient compte des partis. La prise des rennes de cette nouvelle entité est forcément délicate, et demande un certain temps. Pourtant, l’accent est bien mis sur les réponses aux urgences et sur le traitement des projets d’avenir (centre-ville dense).
Ceci s’accomplit dans le cadre de lois récentes, qui redistribuent les compétences entre Région, Département, Agglomérations et communes.
La Région prend la responsabilité du développement économique, qui jusqu’alors relevait du Département. Elle garde celle des transports (Ile de France Mobilités).
Le Département est chargé des services sociaux et du tourisme local. Il doit présenter à l’État un rapport annuel sur l’accessibilité pour tous aux services publics.
Communauté d’Agglomération Grand Paris Sud
L’agglo comptait 24 communes, mais seulement 23 depuis la création d’Évry-Courcouronnes. Peuplée de 340 000 habitants environ, elle contient 130 000 logements (dont 37 000 sociaux), 130 000 emplois, 17 gares RER, 5 Centres Commerciaux Régionaux. De population plus jeune que la moyenne, elle dispose de 2 Scènes Nationales, 2 universités, 130 salles de spectacle.
Elle jouit d’une fiscalité et de compétences propres (obligatoires ou choisies).
Président : Michel Bisson, maire de Lieusaint. Le Conseil Communautaire compte 87 délégués des 23 communes, et un Bureau de 30 membres.
Le président a promis de sauvegarder la souveraineté des communes, tandis que leur compétence générale demeure. Aussi, une « conférence des maires » (non officielle) rassemble les 23 élus avant chaque réunion du Comité d’Agglomération ou du Bureau. Le président tient au consensus. Ainsi les élus devaient récemment se prononcer sur la réforme du RER D. Une seule commune s’est opposée, le texte a été retiré.
Le temps des vrais projets communs n’est pas encore venu. Les deux plateaux et la confluence Seine-Essonne héritent d’histoires et de mentalités très différentes. Cette Agglomération nouvelle relève d’une naissance aux forceps. Au départ, seulement trois communes (Évry, Ris-Orangis et Grigny) y étaient favorables. C’est la répartition des Vice-présidences qui a permis à toutes les tendances de trouver leurs comptes. Attaché au consensus, le président informe de son action chaque semaine, via Facebook.
La mise en musique se complique, en plus, de l’éclatement en trois sites (Lieusaint, Évry-Courcouronnes et Le Coudray-Montceaux (services techniques), et de l’écartèlement entre deux Départements. Pourtant, l’Office de tourisme de Corbeil-Essonnes va prendre la taille de l’Agglomération.
Le dialogue avec la salle permet d’élargir le débat
Comme l’avaient évalué les deux orateurs, dix années seront bien nécessaires pour permettre à chacun de trouver ses marques. Paradoxalement, cette situation renforce les pouvoirs communaux. Personne n’a de vue globale du territoire et les priorités seraient très disparates. Le plateau d’Évry-Courcouronnes, Bondoufle, Ris-Orangis et Villabé était plus avancé que les autres secteurs dans la logique de l’intercommunalité. Trois à quatre années seront sans doute un minimum pour que le travail et l’écoute des communes permette de s’adapter à l’échelle de l’ensemble et de déboucher sur des projets communs. Dans les métropoles de province, de taille comparable, les choses avancent beaucoup plus vite.
Ce travail se structurera en trois grands chantiers : le SCOT (Schéma de cohérence territoriale), le PLH (Programme local de l’habitat) et le développement économique.
Le programme du président Bisson met en avant :
- trois problématiques : la transition sociale et énergétique, le territoire apprenant (adaptation des formations à l’emploi) et l’inclusion républicaine (problèmes sociaux).
- trois dynamiques : le genopole, l’industrie (Évry – Corbeil – Villaroche) et le cluster sports.
- deux leviers : la maitrise publique sur l’eau et le foncier, et la coopération intercommunale.
Tout ceci sans toucher aux prérogatives des communes.
L’ancrage régional
- La métropole du Grand Paris reste pour le moment à l’intérieur de la A86. Il serait important de l’étendre jusqu’à la grande couronne, afin que celle-ci profite du dynamisme de Paris. L’actuelle présidente de la Région y serait favorable, mais pour l’instant, la question n’est pas tranchée.
- Les vicissitudes du polycentrisme. Une agglomération de plusieurs millions d’habitants gagnerait à se structurer en zones distinctes, pour de nombreuses raisons, notamment le rapprochement habitat/emploi, l’affirmation de destinées singulières, la participation démocratique… L’exemple de Lille – Roubaix – Tourcoing plaide en ce sens, en France.
Le SDAU régionale de 1965, qui a décidé la création des villes nouvelles et du RER, visait cette politique. Mais ses 8 villes nouvelles ont été ramenées à 5, et surtout, la politique de « ville à la campagne » a opté pour son contraire : une banlieue à l’américaine largement étalée sur les campagnes voisines, avec multiplication des hypermarchés et désaveu des centres urbains nouveaux. Ils avaient appliqué les idées de la fin des années soixante : retour à la rue bordée d’immeubles collectifs, alors que les promoteurs et leur clientèle plébiscitaient les lotissements pavillonnaires et les zones commerciales type « entrées de villes ».
Cette « ville à la campagne » se heurte aujourd’hui à quelques impasses : ségrégation qui rend les banlieues explosives, artificialisation des terres agricoles dangereuse pour la planète (la surface d’un département tous les 7 ans), « gilets jaunes » qui peinent à supporter la charge d’habiter très loin du travail, alors que les spéculation foncières et immobilières rendent hors de prix le logement dans les zones centrales des agglomérations.
Sous la présidence Sarkozy, une consultation d’architectes pour le Grand Paris avait vu plusieurs candidats proposer une région urbaine structurée en « 20 à 30 Bologne », autant de démocraties de 300 000 à 400 000 habitants. Les projets du Grand Paris Express risquent d’élargir une zone centrale avec un habitat très cher. À moins que soit mise en œuvre une politique nouvelle d’habitat social et de jugulation des spéculations foncières et immobilières. Or cela ne semble pas encore à l’ordre du jour.
En juillet 2018, quatorze personnalités éminentes de l’architecture, l’économie, la géographie, la sociologie… ont publié un manifeste en faveur d’une refonte complète du découpage politique francilien (Le Monde daté du 14-16 juillet). Entre l’échelon régional et l’échelon communal, ils préconisent des intercommunalités vigoureuses renforcées, de l’ordre de 400 à 600 000 habitants. Seront-ils entendus ?
La structuration spontanée est cependant à l’œuvre depuis longtemps. Au nord de Paris, une zone allant de Roissy à Villepinte s’organise peu à peu, autour des activités de l’aéroport et du parc d’expositions. Il en va de même autour de Massy, avec la « porte Atlantique » de la gare TGV (qui attire beaucoup de bureaux) et la matière grise de Palaiseau. Dans ces zones, les hommes d’affaires étrangers implantent des têtes de pont vers l’énorme marché parisien, viennent à des évènements sans se mêler aux encombrements parisiens, qui les effrayent.
Dans notre ville, Corbeil-Essonnes joue ce rôle de porte de Paris depuis des siècles. Dès le XVIIIè Oberkampf, venu de Bavière, y développa sa fabrication textile après des essais à Jouy en Josas. La prospérité de la cuvette s’étend sur les plateaux voisins au XXè siècle, avec des provinciaux venus l’Annecy (Carrefour), de Fontainebleau (Accor) ou de Suisse (Zehnder). La ville nouvelle avait exploité la conjoncture du moment pour créer un regroupement d’activités d’informatique, robotique, automatismes. L’évolution mondiale a délocalisé toutes ces activités vers des pays lointains, mais une agglomération plus puissante saura bien se doter d’un service de développement renforcé, capable de tirer parti des conjonctures nouvelles. La vague de construction de hangars logistiques atteste de la vigueur de notre porte méditerranéenne et continentale.
Personne n’a encore parlé d’une activité d’expositions, mais l’agrandissement continu du parc de la porte de Versailles, bientôt plein comme un œuf, n’ouvrirait-il pas une possibilité en ce sens ?
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